La bière et le foot
(Ceci est un article publié dans l'enstantané, journal de l'ENSTA, spécial playa. Il contient quelques passages techniques, désolé....)
par BL07, en direct de Bielefeld, Allemagne.
L'autre jour je suis en train de bosser pour mon PPL quand Sebastian, un des thésards du labo, viens me voir : « Lundi soir, on va kickern, ça t'intéresses de venir avec nous ? » Bon kickern à tous les coups, c'est taper dans le ballon, faire du foot. Normalement je ne fais pas ce genre de choses, mais là c'est la coupe du monde, je vais pas faire mon séco... En plus il a dit qu'on irait boire une bière avant. Honnêtement je serais plutôt allé boire un bière après le foot mais bon... en Allemagne, faisons comme les allemands.
Le jour dit, je me ramène habillé en footballeur. Enfin... footballeur mais sportif, avec des chaussures de sport et un short. Et là, je me rends tout de suite compte qu'il y a un problème. Les autres ne sont pas déguisés...
« _ Bah... on devait pas aller faire un foot [Fussball Spielen] ?
_Non, on devait aller kickern.
_Ah... et kickern, c'est pas faire un foot ?
_Non, kicken c'est taper dans le ballon mais kickern c'est du Tischfussball». Du football de table... du babyfoot... parfait...
Avant d'aller jouer on est effectivement allé prendre une bière, et là j'en profite pour faire de la pub pour le PPL en Allemagne. On y découvre une des perles de la civilisation germanique : le Biergarten. (Pour ceux qui n'auraient jamais fait d'allemand, ça veux dire le jardin à bière). Non ce n'est pas un champ où pousse du houblon et du malt,.. Imaginez un espace de verdure en pleine ville. Un petit parc, une place voire une cour intérieure où il fait bien frais, un terrain vague. Dessus, vous placez des tables, des chaises et de la bière bien fraîche. Alors vous passez par là avec vos potes, vous vous installez et vous appréciez... Simple et efficace.
Mais bon, revenons au jeu. On s'installe au baby dans un bar. C'est une énorme table massive, avec des barres indestructibles d'au moins 3cm de diamètre, capables de résister à une charge de chevaliers teutoniques, des gros joueurs au pieds carrés et des grosses balles lisses. Pas facile de controller, carrément dur de tirer fort et impensable de tacler...
Les équipes étaient assez bigarées : des doctorants allemands et un chinois, une post-doc japonaise, un stagiaire français et un studentliche Hilfskraft. Le concept du Hilsfkraft est assez sympa : c'est un undergraduate qui se fait un peu d'argent sur un espèce de contrat TAEP. Sauf que c'est pas pour une multinationale capitalistes mais pour aider un chercheur qui n'a pas envie de se taper des heures de programmation.
Bon... engagement... Ouai ici on engage à la volée. On introduit la balle entre les deux rangées de demi par une des petites rigoles ingénieusement disposées de chaque côté et... dieu reconnaîtra les siens. Bon... j'étais au buts... engagement... Et là, le mec aux demis en face tire la balle d'engagement sans la controller et BIM ! But. Applaudissements.
Bon, moi je me dis que dans ce pays, ils ont une autre définition de la courtoisie, mais bon, en faisant un peu attention, ça devrait aller.
J'arrive à arrêter quelques tirs, à faire quelques dégagements bien sentis quand tout à coup... RE-BIM ! Le mec d'en face me mets une pisette en reprise. Ah non mais là ça va plus ! Visiblement dans ce pays ils ne respectent rien ! (j'éxagère... ils interdisent les roulettes, mais ça c'est comme la prohibition de l'inceste, c'est une constante dans toutes les sociétés humaines)
Le pire c'est que j'ai tellement intégré toutes nos règles maisons que c'est devenu des réflexes conditionnés : j'ai beaucoup de mal à jouer salement. Tu comprends vite que tu n'est pas protégé par la sacro-sainte position de pisette, parce que le gars d'en face... il s'en fout. Le pire c'est en attaque : avant même que tu ais réalisé que tu pourrais avoir envoyé une grosse punition en reprise bah... tu as déjà controlé la balle.
Bon finalement, c'est comme tout, on s'y fait... on a joué comme des bourrins, sans aucune finesse, pendant toute la soirée. En Allemagne faisons comme les allemands. J'étais un peu déçu de ne pas pouvoir leur montrer les quelques techniques que le fréquentation assidue de la voie SIC (paix à son âme) et du BDE m'ont apprises. Mais bon c'est comme ça...
Dans un élan d'humanité, j'ai voulu leur apprendre un peu les vraies règles du baby. Celles qui produisent du vrai beau jeu. (D'ailleurs ça peut-être un très bon indicateur de ton niveau dans une langue étrangère : est-tu capable d'avoir une discussion théorique et technique sur le babyfoot sans jamais utiliser le langage des signes ? ) Mais en fait ils m'ont vite arrêté : « Oh tu sais, nous on joue pas assez souvent pour se compliquer la vie avec toutes ces règles »